Narcisse Kouamé
Depuis le lundi 04 mars 2024, la France est devenue le premier pays au monde à avoir inscrit dans sa Constitution le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), avec un vote favorable de 780 parlementaires contre 72 voix opposées au parlement réunie en congrès au Château de Versailles.
C’est l’aboutissement d’un projet qui a débuté depuis 2022 par une frange de parlementaire de tout bord. Une des figures marquantes de ce iniciative est Mathilde Panot, la patronne du groupe Insoumis à l’Assemblée nationale, qui, en 2022, avait été la première à faire une proposition de loi sur l’IVG que le parlement avait adopté.
Pour le président français, Emmanuel Macron, ce projet de loi qui été porté par les ministres Éric Dupond-Moretti (Justice) et Aurore Bergé (Égalité entre les femmes et les hommes) est « un message universel envoyé par le Parlement » a-t-il affirmé selon le Figaro. Et il n’a pas caché d’ailleurs, dans son discours du 8 mars 2024, à l’occasion de la cérémonie de scellement à Paris, place Vendôme, son intention de faire en sorte que cette loi sur l’IVG puisse être inscrite dans la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne. C’est sous une pluie d’ovation que cette loi a été accueilli par les Français présents à l’évènement pour ne pas se faire raconter cet épisode de la vie de leur nation.
En outre, pour les mouvements féministes et de défense des droits de la femme en France, c’est un moment important. En ce sens, pour Violaine Lucas, présidente de l’association Choisir la cause des femmes, fondée par Gisèle Halimi, cette loi est « une grande victoire, puissante, à haute portée symbolique ».

Par ailleurs, devant cette décision de l’Etat qui a changé la donne, l’Eglise catholique en France a exprimé son désaccord. En effet, la Conférence des évêques catholique de France avait déjà fait part de son regret du vote par les sénateurs de l’inscription de la loi sur l’IVG dans la loi fondamentale du pays le 29 Février 2024 à travers un bref discours. Pour les évêques de France, c’est une véritable culture de la mort qui se propage au cœur de la société française, eux qui avaient souligné lors de leur assemblée plénière de novembre 2023 que toute vie est un don pour ce monde. Dans cette même optique, ils soulignent l’absence d’un vrai débat sur la liberté de conscience du personnel médical ainsi qu’un réel accompagnement de celles qui, malgré les difficultés, souhaitent garder leurs enfants. De son côté, le Vatican a également réagi en apportant son soutien à la position de l’Eglise catholique en France. A ce propos, L’Académie pontifical pour la vie, dirigée par Mgr Vincenzo Paglia, estime que la protection de la vie humaine est le premier objectif de l’humanité et appelle tous les gouvernements et toutes les traditions religieuses à s’engager pour la protection de la vie.
Interrogé par le journal la Croix sur cette nouvelle loi, Mgr Pascal Wintzer, archevêque de Poitiers, invite à ne pas se décourager et à faire le choix de l’espérance et de l’engagement qu’elle sous-tend face à une société française de plus en plus hostile à la vie. Dans tous les cas, la journée du 8 mars 2024, jour de la célébration des droits de la femme, marque un tournant radical dans l’approche du droit des femmes à disposer de leur corps en France. Rappelons que le sujet de l’avortement est très débattu dans plusieurs pays et il n’y pas une politique commune des états. On se rappelle par exemple qu’aux Etats Unis, le 24 juin 2022, la Cour suprême avait annulé un arrêt fédéral, Roe vs Wade, qui garantissait depuis 1973 le droit d’avorter sur tout le territoire. Depuis, chaque Etat est libre de déterminer sa propre politique sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Cela montre bien que sur ce sujet de l’avortement, rien n’est acquis et les lois peuvent, du jour au lendemain, changer. C’est donc certainement pour éviter un tel revirement de situation que le ministre français de la justice, Éric Dupond-Moretti, a apposé le sceau de la République française sur la loi inscrivant la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution.
Crédit Photo: (Photo by STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)